Dieu – Paroles de théologiens

Nous ne sommes pas les premiers à réfléchir aux diverses questions qu’abordent la théologie et Pour une foi réfléchie. Des auteurs plus ou moins éloignés de nous dans le temps y ont aussi réfléchi, et ils ont tenté d’apporter leurs réponses. C’est l’occasion de constater que certaines préoccupations actuelles étaient déjà celles de nos prédécesseurs et de méditer leurs conclusions…

«Le Père a un Fils, et toutefois il n’est pas Fils; et le Fils a un Père, et il n’est pas Père. Or, en qui s’affirme de lui sans rapport à un autre, il est ce qu’il a. Ainsi, comme il est dit de lui qu’il est vivant, il est aussi la vie qu’il possède. C’est pourquoi ont dit qu’il est une nature simple; car, pour lui, ce n’est pas avoir que de pouvoir perdre; il a, et ce qu’il a n’est autre que lui.»

Augustin, La Cité de Dieu 11.10

«Nous aussi, nous regardons la parole et la raison, et aussi la puissance par lesquelles Dieu a tout créé, nous l’avons dit, comme une substance propre que nous appelons «esprit»: la parole est dans cet esprit quand il commande, la raison le seconde quand il dispose, la puissance l’assiste quand il réalise. Nous disons que Dieu a proféré cet esprit et qu’en le proférant il l’a engendré, et que pour cette raison il est appelé Fils de Dieu et Dieu, à cause de l’unité de la substance car Dieu aussi est esprit.

»Quand un rayon est lancé hors du soleil, c’est une partie qui part du tout; mais le soleil est dans le rayon, parce que c’est un rayon du soleil, et que la substance n’est pas divisée, mais étendue, comme la lumière qui s’allume à la lumière. La matière-source demeure entière et ne perd rien, même si elle communique sa nature par plusieurs canaux.

»Ainsi, ce qui est sorti de Dieu est Dieu, Fils de Dieu, et les deux ne font qu’un. Ainsi l’esprit qui vient de l’esprit et Dieu qui vient de Dieu est autre par la mesure, il est second par le rang, non par l’état, et il est sorti de sa source sans s’en être détaché.

»Donc ce rayon de Dieu, comme il avait été toujours prédit auparavant, descend dans une Vierge et, s’étant incarné dans son sein, il naît homme mêlé à Dieu. La chair unit à l’esprit se nourrit, croît, parle, enseigne, opère, et voilà le Christ.»

Tertullien, Apologétique 21.11-14

«Dieu ne parle à l’homme par aucune créature corporelle, il ne frappe point l’oreille d’accents qui vibrent dans l’air intermédiaire entre la parole et l’auditeur; il ne se sert d’aucune de ces images spirituelles, semblables aux figures des corps et aux fantômes de nos songes; et cependant il semble que l’oreille l’entend, car il semble qu’il parle par des organes corporels, et comme à différentes distances locales; ces manifestations présentent en effet de nombreuses similitudes avec les corps; mais il parle réellement par sa vérité même, langage qu’entend de l’esprit, et non de l’oreille, quiconque est propre à l’entendre.»

Augustin, La Cité de Dieu 11.1

«L’ordre dans lequel les choses ont été créées nous montre, si nous sommes attentifs, que l’amour paternel de Dieu envers le genre humain l’a conduit à ne pas créer Adam avant d’avoir enrichi le monde et l’avoir pourvu en abondance de tous les biens. Si Dieu avait installé Adam sur la terre lorsque celle-ci était stérile et vide, s’il lui avait donné la vie avant qu’il fasse clair, on aurait jugé qu’il n’avait pas pris soin de lui fournir ce qui lui était utile. Mais, comme Dieu a attendu pour créer l’homme que le soleil et les étoiles suivent leurs cours pour notre bien, que les eaux et l’air aient été garnis de toutes sortes d’animaux, que les arbres aient produit une grande variété de fruits pour nous nourrir, nous ne pouvons qu’admirer la merveilleuse bonté dont il a fait preuve envers nous en père de famille attentif et généreux.»

Jean Calvin, Institution de la religion chrétienne (en français moderne) 1.14.2

«En Dieu, une seconde volonté n’a pas modifié ou supprimé la première; c’est en vertu d’une seule et même volonté, éternelle et immuable, qu’il a produit toutes ses créatures; si elles ne sont point d’abord et tant qu’elles ne sont point, si elles sont ensuite et aussitôt qu’elles commencent d’être, c’est qu’il le veut ainsi, montrant peut-être, par une admirable providence, aux yeux capables de voir combien il avait peu besoin de ses créatures et que leur être n’est qu’un don gratuit de sa bonté, puisqu’une éternité sans elles ne laissait aucun vide dans sa félicité.»

Augustin, La Cité de Dieu 12.17

«Dans son éternité et dans son Verbe coéternel à lui-même, une immuable prédestination avait décidé tout ce qui devait être en son temps.»

Augustin, La Cité de Dieu 12.16

«C’est un profond mystère que Dieu ait toujours été, et que, pour la première fois, depuis le temps, il ait voulu créer l’homme sans déroger à l’immutabilité de son conseil et de sa volonté.»

Augustin, La Cité de Dieu 12.14

«Ce que nous adorons, c’est un Dieu unique, qui, par sa parole qui a commandé, par sa raison qui a disposé, par sa vertu qui a pu tout, a tiré du néant tout cet édifice gigantesque avec tout l’appareil des éléments, des corps, des esprits, pour servir d’ornement à sa majesté: c’est aussi pourquoi les Grecs ont appliqué au monde le nom de kosmos (ornement).

»Dieu est invisible, bien qu’on le voie; il est impalpable, bien que sa faveur nous le rende présent; incompréhensible, bien que les facultés humaines le conçoivent: c’est ce qui prouve son existence et sa grandeur. Les autres choses qu’on peut voir, palper, comprendre, sont moindres que les yeux qui les voient, que les mains qui les touchent, que les sens qui les découvrent; mais ce qui est infini n’est parfaitement connu que de soi-même.

»Ce qui fait comprendre Dieu, c’est précisément l’impossibilité de le comprendre. Ainsi l’immensité de sa grandeur le dévoile et le cache tout à la fois aux hommes. Et c’est le crime principal de ceux qui ne veulent pas connaître celui qu’ils ne sauraient ignorer.»

Tertullien, Apologétique 17.1-3

«Supposez que ce vaste corps du monde soit éternel et incréé, suivant l’opinion de Pythagore, ou qu’il soit né et qu’il ait été fait, suivant celle de Platon: ce qui est certain, c’est que, dès son origine, il s’est trouvé, une fois pour toutes, disposé, pourvu, ordonné et muni du gouvernail d’une parfaite sagesse. Le principe qui a réalisé toutes choses à la perfection n’a pu être imparfait.»

Tertullien, Apologétique 11.5

«En nous cette raison est inébranlable que le Tout-Puissant ne fait rien sans raison, de tout ce dont notre faible esprit ne peut rendre raison; sur beaucoup de points sa volonté pour nous est incertaine, mais nous sommes très certains qu’il n’est rien d’impossible à sa volonté, et nous croyons à ce qu’il annonce, parce qu’il nous est impossible de le croire impuissant ou menteur.»

Augustin, La Cité de Dieu 21.5

«La colère de Dieu n’est pas une perturbation de son esprit, mais un jugement par lequel il prononce le châtiment du péché. Et sa pensée, sa réflexion, est l’immuable raison des changements qu’il a déterminés. Car Dieu ne se repent point, comme l’homme, de ses actes. En toutes choses, son conseil n’est pas moins stable que sa prescience certaine. Mais si l’Ecriture ne se servait de telles expressions, comment pourrait-elle, soucieuse de pourvoir à l’intérêt de tous les hommes, s’insinuer familièrement auprès d’eux, pour épouvanter l’orgueil, réveiller l’indolence, exciter la recherche, et nourrir la science? Il faut donc qu’elle s’incline, il faut donc qu’elle descende jusqu’à leur bassesse.»

Augustin, La Cité de Dieu 15.25